BODHIPAKSA – Le végétarisme, une vue bouddhiste

BODHIPAKSA – Le végétarisme, une vue bouddhiste. Almora. 2017. 192 pages. 15euros.

Bodhipaksa le vegetarisme

Interview d’Ujumani, traducteur : RENCONTRE AVEC DHARMACHARI UJUMANI (traducteur de BODHIPAKSA)

Editeur : Ce livre est une présentation du végétarisme du point de vue du bouddhisme. L’auteur, Bodhipaksa, qui est vétérinaire de formation et bouddhiste pratiquant, est idéalement placé pour aborder cette question. Nos contemporains sont de plus en plus sensibles à la souffrance animale et il existe un véritable intérêt pour le végétarisme et le véganisme.

Le Bouddha mangeait-il de la viande ? Retournant au bouddhisme, et constatant que tous les bouddhistes ne sont pas végétariens, Bodhipaksa considère ensuite cette question en la replaçant dans un contexte historique. Il nous présente l’éthique bouddhiste faite d’empathie et de bienveillance pour tous les êtres vivants.

Le livre décrit enfin les bénéfices du végétarisme : les bénéfices pour nous­-mêmes et notre santé; et les immenses bénéfices pour le monde, le développement du végétarisme ayant un impact immédiat sur la préservation de ressources naturelles aujourd’hui en grand danger.

Cet ouvrage intéressera bien sûr les bouddhistes, mais plus largement tous les lecteurs soucieux du bien-être animal, ou de l’écologie et tous ceux qui s’interrogent aujourd’hui sur leur consommation de viande.

« Une analyse éclairante et bienvenue » Matthieu Ricard.

L’auteur : Bodhipaksa est né en Écosse et vit aujourd’hui aux États-Unis, dans le New Hampshire. Il a deux enfants et est vétérinaire diplômé de l’Université de Glasgow. Bodhipaksa pratique la méditation depuis 1982, et est devenu membre de l’Ordre bouddhiste Triratna en 1993. Il enseigne à Aryaloka, le centre bouddhiste proche de chez lui, et s’occupe du site internet de l’Esprit Indompté (WildMind.org), dédié à la méditation et à son enseignement.

*** Mon Avis ***

Une excellente approche, bouddhiste et rationnelle, du végétarisme

 

 Je ne suis pas encore végétarien. Mais j’y travaille. C’est un combat quotidien. J’ai même milité dans une association très connue à ce sujet. Mais je n’ai pas encore franchi le pas – enfin si, mais j’ai fais marche-arrière à plusieurs reprises – car c’est bel et bien un combat : contre les tentations; contre le plaisir; contre les habitudes; contre le marketing; contre la sociabilité; contre la facilité; contre la consommation, et combien d’autres choses ?
 Mais en tant que bouddhiste – parce que les valeurs bouddhistes me sont chevillées « à l’âme » – je ne peux rester indifférent à ces milliards d’animaux que l’on abat chaque année. Quand je pense à eux, mon coeur se serre et les larmes me montent aux yeux; et mon abdomen, mon estomac se retournent – et vous, qu’en est-il ? « Les animaux sont mes amis… et je ne mange pas mes amis » disait George Bernard Shaw

 L’on sait les conditions effroyables, terrifiantes, dignes des films d’horreur les plus dégueulasses, dignes des méthodes totalitaristes et des plus grands holocaustes, dans lesquelles les animaux sont concentrés puis abattus – mais aussi « élevés », dans des ferme-usines ! Et gardez bien en tête que, majoritairement, nous mangeons des bébés et des adolescents : nous ne laissons même pas vivre convenablement ces animaux. Les vaches et chevaux vivent en ferme maximum cinq ans !
 N’oubliez pas non plus – je n’oublie pas ce dont je vous parle, mais Bodhipaksa le rappelle encore mieux – que ce que nous mangeons, « la viande », quand elle arrive sur l’étal du boucher ou dans les rayons des supermarchés, a déjà 8 à 10 jours : nous ne faisons que manger… des cadavres. Même le lion mange de suite sa proie ! Mais le lion a un court intestin et plein de dents pointues – c’est un carnivore. Sommes-nous conçus pareils ? Qu’en pensez-vous ?

 En fait, comme avec les prisons, nous devrions pouvoir aller « visiter » les abattoirs à l’improviste afin d’en avoir le coeur retourné – ou au moins, de manger en toute conscience.
 A-t-on le droit de manger de cette « viande », débitée, transformée, embellie – qui n’est plus un animal qui a sa propre conscience et sa propre personne, et qui est désidentifiée et désincarnée ? Cette matière première que l’on n’a même pas abattu soi-même ? Se rend-on compte de ce privilège ? En avons-nous honte ?
 Quel est cet autre privilège de confier à des fous – les « tâcherons » de l’abattoir, qui gagnent trois fois le SMIC pour l’horreur qu’ils font subir et subissent – ce que nous n’arrivons pas à faire de nos mains ?
 Et l’on constatera que chaque fois qu’est évoquée la « question animale », deux camps, séparés par celui de l’indifférence, s’opposent, tant le sujet est brûlant. Aujourd’hui, il est si facile de manger de la viande, il y en a tant ! Mais aujourd’hui, s’il y en a tant, c’est qu’on abat à la chaîne, H24.

 Le livre de Bodhipaksa, traduit par Ujumani et Marion Frier, préfacé par Matthieu Ricard, très documenté et sourcé, est donc un sujet central pour tout bouddhiste qui se revendique ainsi et qui a pris le premier de tous les vœux : celui de ne pas tuer.
 On m’objectera : aucun bouddhiste n’a jamais tué intentionnellement un animal.   Peut-être bien, mais il a fait tuer, et s’en est réjouit, puisqu’il a mangé avec plaisir.
 Il en a donné l’ordre indirectement même, puisqu’il participe à cette politique de l’abattoir, et que c’est sur sa décision qu’il mange « de la viande » – de l’animal ! Il achète et mange de la viande : il est donc un donneur d’ordre. Il participe. 
 Quand on mange de la viande, c’est consciemment, même superficiellement. C’est donc participer à la chaîne qui va de notre bouche à la naissance du petit animal qui naît sur le béton des fermes, destiné à l’abattoir, que l’on bourre de médicaments, à qui l’on fait manger de la chair animale (!), que l’on mutile, oppresse, compresse, parque, étouffe, le laissant à peine bouger, vivre dans ses excréments, sans voir la couleur du ciel.

 Tout cela, Bodhipaksa ne le dit que trop bien dans son livre.
 Il détaille, méthodiquement, et sans en ajouter des couches, les processus pour les principaux animaux élevés en ferme et qui finiront, sous des formes qui n’y font plus référence, dans notre assiette, dans notre bouche et que nous finirons par déféquer.
 « Le végétarisme, une vue bouddhiste » est « sectionné » en sept parties…
1_ Les souffrances des animaux de la ferme : nous expose celles-ci telles qu’il les a vu – car Bodhipaksa est vétérinaire ! C’est une source on ne peut plus fiable ! Cette partie-là est révoltante, mais il faut bien commencer par elle.
2_ Pourquoi nous sommes bestiaux envers les animaux ? : Bodhipaksa donne ici les « arguments » de la culture occidentale, avant de donner la perspective bouddhiste en la matière.
3_ L’éthique bouddhiste : cette partie-là devrait nous toucher particulièrement et nous aider à nous ressaisir.
4_ Les bénéfices du végétarisme : s’appuyant sur des études scientifiques, l’auteur nous montre que nous sommes totalement à côté de la plaque. Ne soyons guère étonné si nous tombons malade de notre carnivorisme !
5_ Questions fréquemment posées : 10 questions-réponses qui sont un bon début pour changer de régime !
6_ Le Bouddha mangeait-il de la viande ? : Cette partie est peut-être la plus surprenante. Je ne vous en dis pas plus : lisez !
7_ Viande et metta : c’est la partie où Bodhipaksa essaie personnellement de convaincre tout bouddhiste qui se respecte de changer d’attitude gràce à metta.
 Puis Bodhipaksa conclut l’ouvrage – mais c’est un vœu pieux qu’il adresse, je pense, aux lecteurs. Viennent ensuite les fort nombreuses notes.

 Bien entendu, Bodhipaksa essaie de prendre une certaine hauteur sur le débat, mais ses arguments sont imparables je dirais. Je le trouve dépassionné.
 Je regrette donc que son parti pris soit peu affirmé, mais en fait : il nous laisse nous faire notre propre idée, notre propre expérience. Bodhipaksa veut nous donner des billes, mais pas nous convaincre directement. Bien qu’il soit évident que nous devrions, bouddhiste ou pas, devenir végétarien.
 Bodhipaksa nous laisse ainsi notre liberté. Il a raison ! Mais il faudra compléter avec d’autres ouvrages, dont je vous parlerais peu à peu. L’ouvrage est néanmoins un bon socle pour une réflexion, mais ne tardez pas (ni moi !) à changer !
 La littérature végétarienne, pro-animale, est fournie, mais cette question traitée au travers du prisme bouddhiste est encore naissante.
 Lecture impérative si vous êtes bouddhiste !

 Bonne lecture !

Zui Ho.

Bodhipaksa. Ujumani. Marion Frier. Ordre Bouddhiste Triratna. Végétarisme. Almora. Livre Bouddhiste. Livre bouddhisme. Ouvrage de référence. Coup de coeur. Ethique bouddhiste. Souffrance animale. Animal/animaux. Vulgarisation scientifique. Bouddha Shakyamuni.

Laisser un commentaire

Site Web créé avec WordPress.com.

Retour en haut ↑